Chère maman,

Aujourd’hui c’est le jour de mon 19ème anniversaire, mais comme d’habitude je n’aurais pas de nouvelles de toi. Je recevrais peut-être une carte de papa ou juste un sms mais au moins lui pensera à moi, chose dont je suis sûre, toi tu ne te rappelleras même pas que 19 ans plus tôt, tu mettais au monde une magnifique petite fille pour qui tu n’as jamais eu aucun intérêt avouons le.

[19 ans plus tôt, je naissais dans une famille unie par l’amour de parents aimants et avec une sœur aînée ravie d’avoir un peu de compagnie bien que jalouse au début. Le rêve vira vite au cauchemar pour moi car sans aucune raison, ma mère ne m’aimait pas. Elle préférait ma sœur au quotidien, préférait la serrer dans ses bras, lui faire des câlins, lui acheter des jouets, la combler tout simplement. Ma sœur qui était en fait une horrible enfant gâtée adorait sa vie et ne se souciait pas réellement de moi… Le seul qui m’aimait du moins un peu était mon père, lui essayait de combler le manque maternelle en m’emmenant faire des promenades, m’achetant de temps en temps des choses qui égayeraient mon quotidien… Mais le problème était qu’il était souvent absent et je restais de ce fait seule, sans personne à qui parler, j’étais complètement renfermée sur moi-même, quand nous sortions ma mère ne me tenait pas la main, elle me laissait marcher derrière elle à une distance d’un mètre et ne se retournait jamais pour voir si je suivais, quand je lui demandais quelque chose, elle faisait semblant de ne pas m’entendre, ou de chasser une mouche qui volait près de sa tête, tout ça était très dur à vivre. Le regard des gens emplit de pitié n’embêtait en rien ma mère qui continuait son chemin portant fièrement sur son cœur sa petite fille préférée comme un trophée. Elle répétait sans cesse qu’elle était la plus belle chose qu’elle avait fait dans sa vie, sa plus belle réussite. Dur à entendre quand vous avez à peine 9 ans et que vous comprenez que jamais votre mère ne vous aimera.]

Cela fait maintenant 2 ans que je t’écris une lettre à chacun de mes anniversaires, bien évidemment je ne te les envoies pas car je sais pertinemment qu’elles finiraient dans la cheminée tandis que tu serais au téléphone avec ma sœur depuis plus d’une heure pour juste prendre de ses nouvelles comme chaque soir. Aujourd’hui, ça fait 2 ans que j’habite chez tante Jude, deux ans que j’ai coupé les ponts avec vous. A la fin de mes études, tu exigeais que je devienne avocate, surprise toi qui ne t’étais jamais souciée de moi tu voulais finalement que ta fille ne te fasse pas totalement honte et ait un beau métier. C’était sans te douter que je ne t’obéirais pas. Après avoir fait de mon existence, une longue route déserte de sentiments maternel tu pensais réellement que j’allais faire selon ton bon vouloir. Ce soir là, tu m’as hurlé dessus comme jamais tu ne l’avais fait, enfin ton indifférence cessait. Pourtant je n’en avais que faire, depuis longtemps l’amour que j’aurais du te porter c’était transformé en haine et je ne t’aurais fait le plaisir d’aller dans l’école que tu m’avais choisie pour rien au monde. J’ai donc fais mes valises, je sentais que rester à la maison représentait une voie sans issue, avec vous j’étais coincée, je ne vivais pas. Montant dans le premier bus je débarqua chez tante Judith et puis tu n’as plus jamais entendu parler de moi. Ca t’étais égal j’en suis sûre, mais tu dois savoir que je n’ai eu aucun mal à ma faire à ma nouvelle vie, elle au moins m’aimait, me soutenait au quotidien, s’intéressait à mon travail scolaire, à ma vie, à mes amis, car oui j’avais des amis et heureusement sinon je n’aurais pas survécut à 17 ans de vie avec vous. T’écrire ma haine me fait du bien, t ‘écrire ma vie aussi car même si je n’ai pas l’espoir que tu changes d’avis, ni que tu lises ses lettres, je sais que de coucher ses mots sur le papier m’aide à exorciser. Je suis en première année de photographie, quelle folie n’est-ce pas ? Un métier si incertain, pourtant si tu savais à quel point prendre mon appareil et immortaliser la vie me rendait heureuse ? Je travaille aussi dans une boutique de disque, où chaque jour je peux assouvir ma passion de la musique, échanger avec des gens, discuter,… Ma vie a repris un semblant d’humanité. Et quelle humanité ? Tu dois sûrement avoir entendu parler des âmes, même dans ta parfaite petite vie stérilisée, tiens ça me fait penser ?! Tu savais que j’en avais rencontré ? Peut-être que finalement toi aussi tu étais possédée, peut-être est-ce l’explication de ton comportement envers moi ?! Ou non je devrais arrêter définitivement de me poser des questions, tu étais juste indigne et il n’y avait pas d’autres explications. Enfin… Je ne sais pas si ça t’intéresse mais je commence à ressentir de drôles de sentiments, je ne dirais pas que c’est de l’amour car je ne sais pas ce que c’est, mais je suis inlassablement attirée par un garçon, il est différent des autres je ne te dirais pas pourquoi… Mais je sais qu’à l’avenir, plus rien ne sera pareil si je m’approche trop près de lui…Tu doutes sûrement que je puisse l'intéresser ! Pourtant, j'ai déjà eu plusieurs demandes, je ne semble pas aussi inintéressante et nulle que tu me le faisais penser, j'ai laissé mes cheveux pousser depuis mon départ, ils m'arrivent maintenant jusqu'au milieu du dos, je me maquille, je met plus souvent des jupes et des shorts ce qui laisse apparaitre mes longues jambes, même si c'est difficile à croire, je plais et je ne savais pas que de le savoir pouvait faire autant de bien.

A l’année prochaine, qui sait peut-être aurais-je plus de choses à t’apprendre.

Ta fille, Silver.