Encore. Je n'aurais pas dû venir normalement, je savais très bien que Nichola devait aller voir Andrew ce jour-là, à cette heure précise. Je le savais, mais ça ne m'avait pas empêché de venir, ma mémoire est alliée à mon inconscient, ils ont dû comploter pour que ce détail soit oublié. J'étais venue quand même. Ma vision et quelques mots échangés ont suffi pour qu'il craque. J'avais bien évidemment gardé mon sang-froid. Cela m'amusait, même si le fait que mon favori ait dû sacrifier une amitié pour moi devrait me faire culpabiliser. Puis Andrew est arrivé. Je me demandais si tout cela était réel. Ces scènes étaient si violentes qu'elles faisaient rider mon front. On me dira que je devrais être habituée. C'est vrai, je le suis. Cependant, le spectacle était déchaîné, même pour une gigantomachie vampirique. Parce que ce combat n'était pas uniquement celui d'un homme qui défend sa bien-aimée de celui qui la critique, non, c'était aussi la bataille de deux anciens amis. Cette vérité dernière expliquait tout à fait le dédoublement de la frénésie présente. Cela concernait plus le versus moral que le physique, bien évidemment, car chacun en voulait à l'autre à cause de la fracture de leur amitié, c'était évident ; chacun se rejetait la faute et surtout chacun connaissait l'autre et savait ses faiblesses.

Comment as-tu osé ? demanda Andrew.

Il m'avait brutalement poussée, mais dans un geste protecteur. La douceur de sa violence était excise et c'est l'une des choses qui me plaisait le plus chez lui. Malgré tout, j'avais assez vite frappé le mur dans un bruit assourdissant. Cela faisait longtemps que je n'avais pas entendu un pareil son. De plus, le taux de décibels n'aurait de cesse de monter, à présent que la frénésie était lancée. J'aimais tant voir Krone souffrir, autant physiquement que moralement. C'était tout simplement grisant. Le voir passer d’un bout à l’autre de la pièce, observer les murs trembler sous la puissance des coups réceptionnés par son corps frêle. Ce que j’aimais moins en revanche, c’était lorsque la situation se renversait et qu’Andrew prenait. J’hésitais à prendre parti, même si je savais très bien que je mettrai Nichola à terre en un rien de temps. J’ignorais si le combat était le leur ou si c’était également le mien car chaque fois que mon favori souffrait, je sentais comme une défaite et je détestais les défaites. De plus, ils se battaient par ma faute. Je n’étais pas une personne du genre à culpabiliser, c’est certain. Mais, c’était surtout un argument de plus pour me permettre de participer à ce combat et de faire se taire Mr Krone. Je ne supportais plus le son de sa voix, la vision de son visage. Il était beau, certes, mais c’était tout à fait normal puisqu’il était vampire, suceur de sang rime avec élégant, c’est bien connu. J’ignorais un peu, à vrai dire, les raisons basiques de ma haine pour cet être, car il m’a suffi de le voir pour nourrir ce sentiment de colère envers lui, même si c‘était tout à fait réciproque.
Je continuai mon analyse ; deux parties de moi débattant sauvagement pour juger du pour ou du contre des deux options. Résultat : Je ne me décidais toujours pas. Que faire ? Cette question me trottait dans la tête et malgré que l’idée de me contenter de regarder ce spectacle intéressant était fort tentante, je me devais par je ne sais quel principe de réfléchir à une autre solution que la facilité. La facilité, c’est pour les faibles, je suis beaucoup de choses, mais je ne suis absolument pas faible. Surtout pas, jamais. Je me levai donc, très tranquillement et soulevai légèrement ma robe serrée pour plus de mouvement. J’approchai tout aussi doucement d’Andrew, mes talons hauts claquants bruyamment sur le marbre du sol.

«  Excuse-moi, mais ce n’est pas la peine de se battre pour moi, tu sais. Je levais un sourcil et indiquait Nichola du regard, l'espace d'un instant. Je peux me débrouiller seule. De plus, ce jeu me lasse. Je m’absente, donc. Au revoir, Andrew. »

Je tournai la tête vers Nichola et lui adressait un signe de tête.

«  Nichola. »

Sur ce dernier nom au goût amer, je quittai la demeure. Je travaillai le reste de la journée.